Le Tour de France étoffe sa liste des exclus



Deux jours... C'est tout ce qu'il aura fallu attendre pour que la liste des persona non grata du prochain Tour de France s'allonge; vendredi 18 juin, Jean-Marie Leblanc, directeur général de la direction de la société du Tour de France, devait annoncer qu'elle ne souhaite pas voir au départ de son épreuve, samedi 3 juillet au Puy-du-Fou (Vendée), l'équipe italienne Vini Caldirola. Cette dernière sera remplacée par une autre formation transalpine, Cantina Tollo.

Cette décision a été prise après que celui qui est le chef de file de Vini Caldirola, l'Ukrainien Sergueï Honchar, a été déclaré momentanément inapte à la pratique de son activité et exclu du Tour de Suisse. A l'occasion de contrôles sanguins réalisés, jeudi 17 juin, par les médecins de l'Union cycliste internationale (UCI) sur les 147 concurrents présents sur l'épreuve helvétique, Sergueï Honchar présentait un hématocrite supérieur au plafond autorisé (50 %).

L'Autrichien Harald Morscher, de l'équipe italienne Saeco, l'Italien Massimo Gimondi et le Zimbabwéen Timothy Jones, tous deux employés par la formation italienne Amore e Vita, ont également été mis au repos et exlus du Tour de Suisse pour les mêmes raisons. Ces deux derniers ont été licenciés par leur équipe. Morscher, lui, a été suspendu par Saeco, formation qui demeure invitée sur le Tour de France.

La société du Tour de France justifie cette différence de traitement par le fait que « notre règlement stipule qu'une équipe doit aligner ses meilleurs éléments au départ, ce qui, en l'absence de Honchar, ne serait pas le cas pour Vini Caldirola ». Saeco ne pourra toutefois pas aligner Harald Morscher sur la Grande Boucle.

« À LA FRANÇAISE »

La société du Tour de France estime qu'elle ne pouvait sanctionner sur la base du seul niveau de taux hématocrite supérieur à 50 %, qui ne constitue pas une preuve de dopage , même si, pour tout le monde, il est signe d'une prise d'EPO (érythropoéïtine). Jusqu'à présent, le moyen de déceler cette prise d'EPO n'existe pas.

Cela pourrait changer, comme en témoigne l'annonce faite par le professeur Gérard Dine au congrès d'hématologie de Barcelone, vendredi 11 juin ( Le Monde du 12 juin). « Notre méthode consiste à rechercher une dizaine de paramètres dans le sang, afin d'obtenir des informations sur une éventuelle production anormale d'oxygène par la moelle épinière », explique le directeur de l'institut biotechnologique de Troyes, concepteur du suivi médical longitudinal « à la française ».

Cette communication a toutefois provoqué de vives réactions. « Effet d'annonce », a dénoncé Patrice Mangin, médecin à l'institut universitaire de médecine légale de Lausanne et conseiller médical auprès de l'UCI pour les questions de dopage, interrogé par Le  Monde. « Je ne veux pas qu'on aille trop vite, a-t-il ajouté, nous ne sommes pas là pour vendre de la marchandise, ni faire notre propre publicité.  »

Mardi 15 juin, une autre voix de l'UCI, anonyme celle-là, avait déclaré à l'AFP : « Les affirmations du professeur Dine ne sont pas nouvelles et n'ont jamais été prouvées dans les faits. Il ne paraît ni sérieux ni utile de procéder à ces tests.  » Le reproche avancé par les représentants de l'UCI porte sur l'absence de validité scientifique.

« Faux, rétorque Gérard Dine. Ma communication s'appuie sur des observations et une méthodologie validées au plan scientifique. Un confrère italien de l'université de Pavi et des confrères de Sydney parviennent à des résultats identiques. » Pour Gérard Dine, la décision de pratiquer des contrôles visant à mettre en évidence « la suspicion de prise d'EPO » ne relève plus que d'une volonté politique. « Il ne reste qu'à établir, sous l'égide de l'UCI, un protocole international qui permettrait de procéder dans les plus brefs délais à la mise en place de ces contrôles. »

Cette idée d'une mise en place rapide a été rejetée, jeudi 16 juin, par Alain Garnier, chef de la mission « médecine du sport » au ministère français de la jeunesse et des sports. « Il n'existe aucun élément scientifique nouveau qui permettrait de dire que les autorités publiques ou sportives refusent d'utiliser les ressources scientifiques existantes. La méthode n'apporte aucune preuve juridique mettant en évidence l'infraction », a-t-il estimé ..

Yves Bordenave et Philippe Le Coeur


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