Le report de la recherche de l'EPO est accueilli avec déception



La décision de l'UCI a pris de court le peloton français .
Après que l'Union cycliste internationale (UCI) a décidé de surseoir à la mise en oeuvre de la méthode française de détection de l'érythropoïétine (EPO), prévue à l'occasion du Tour de France (1er -23 juillet), coureurs et responsables d'équipes français font part de leur amertume



« Déception. » Dans la bouche des représentants du milieu cycliste français présents dans les environs du Poiré-sur-Vie (Vendée), qui accueillaient, samedi 24 et dimanche 25 juin, les épreuves en ligne du championnat de France sur route, c'est le mot qui revenait le plus souvent au lendemain de la décision de l'Union cycliste internationale (UCI) de ne pas valider, dans l'immédiat, la méthode de recherche de l'érythropoïétine (EPO) dans les urines mise au point par le Laboratoire national de dépistage du dopage de Châtenay-Malabry ( Le Monde du 23 juin).

Cette nouvelle a pris de court un peloton français, à qui « on avait fait miroiter une lueur d'espoir, comme le relève Michel Friess, le directeur de la communication de La Française des jeux. « Là, on leur retire le tapis sous les pieds. » « On ne s'attendait pas à ça », relance Stéphane Javalet, le directeur sportif de l'équipe BigMat Auber, qui n'est certes pas concerné au premier chef, puisque sa formation n'est pas invitée sur le Tour de France 2000, où la méthode devait officiellement être mise en oeuvre pour la première fois, mais qui juge qu' « encore une fois, c'est l'image du vélo qui trinque ».

« Cela n'est pas bon. On pensait que c'était fait, tout le monde tombe sur le cul », reprend Michel Gros, le directeur sportif de l'équipe Jean Delatour, qui, même s'il ne participera pas à la Grande Boucle, veut malgré tout croire à « la porte entrouverte » par l'UCI. Celle-ci a laissé entendre que le test pourrait peut-être quand même être mis en oeuvre au départ du Tour de France, ou, à tout le moins, en cours d'épreuve, et que, quoi qu'il en soit, les échantillons d'urines prélevés lors des contrôles pourraient être conservés et se voir appliquer le test rétroactivement dès qu'il sera validé.

« Il faut vraiment que tout soit fait pour une application lors des Jeux olympiques et des championnats du monde, sinon ce sera la merde », prévient-il. « Cela ne sert à rien de bavasser, ça arrivera, c'est ce qu'il faut se dire », considère Philippe Raimbaud, le manager de la formation Bonjour, qui se déclare « en désaccord » avec Xavier Jan, le coureur de La Française des jeux, selon qui les cyclistes français auraient peut-être intérêt à rester chez eux en juillet, vu le contexte et ce qu'ils ont encore subi sur le récent Critérium du Dauphiné Libéré ( Le Monde du 23 juin).

« A La Française des jeux, ils ont une politique jusqu'au-boutiste, qui fait qu'ils ne pensent plus qu'à ça. C'est un peu le piège, poursuit Philippe Raimbaud. C'est vrai que cela fausse les choses. C'est vrai que depuis le début d'année, on n'a pas vu de changement. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de place pour une existence. Nous l'avons montré. Le monde ne s'arrête pas de tourner. La situation n'a pas empiré avec cette décision de l'UCI. Elle reste la même, malheureusement. Mais je me demande si ce n'est pas mieux d'ailleurs que la mise en place du test n'intervienne que durant le Tour de France, car cela pourrait créer des surprises. »

« Si cela devait se faire finalement, tant mieux, mais est-ce que cela va changer quelque chose ? », interroge quant à lui Pierre Rivory. Cet ancien coureur, professionnel au début des années 1970, aujourd'hui directeur du pôle cyclisme Rhône-Alpes/Saint-Etienne, n'est pas très optimiste : « Cela modifiera peut-être des stratégies d'équipes, ou de médecins, mais fondamentalement, il n'y a pas de virage à 180o à attendre. On va se réfugier derrière ça, comme on l'a fait avec le suivi, pour masquer le problème. Parce que des gars qui ont gagné, qui ont été des vedettes avec une préparation chimique, ne peuvent plus revenir en arrière. Il faut autre chose que des contrôles pour en sortir. »

Philippe Le Coeur


Un délai de trois ou quatre mois
Irrités par les interprétations qui ont pu être faites des conclusions des experts délégués par l'UCI, quant à leur nouvelle méthode de dépistage, Jacques de Caerriz et Françoise Lasne, du laboratoire national de dépistage du dopage de Châtenay-Malabry, ont, vendredi 23 juin, tenu à s'expliquer. En pratique, le test devra progressivement être développé par différents laboratoires agréés par le CIO. Des travaux devraient étudier les résultats obtenus chez des athlètes ayant séjourné en altitude ou s'étant entraînés dans des espaces où la pression atmosphérique est artificiellement abaissée. Des travaux complémentaires chercheront, en outre, à établir si les résultats varient ou non en fonction de l'origine ethnique des athlètes. « Tous ces éléments devraient être obtenus et réunis dans trois ou quatre mois, a confié Jacques de Caerriz au Monde. Mais ceci n'interdit en rien à l'UCI et au CIO de prendre clairement position pour ce qui est du prochain Tour de France ou des Jeux olympiques de Sydney. »