Blandine Bitzner ne renonce pas à son combat antidopage



Niort (Deux-Sèvres) de notre envoyée spéciale

Vendredi 30 juillet, à l'issue du 5 000 m, Blandine Bitzner a vu rouge - comme le chouchou qu'elle arbore au bras pour signifier son combat en faveur d'un sport propre et réclamer l'instauration de contrôles sanguins inopinés en athlétisme. En l'absence de la recordwoman de France, Yamna Belkacem (15 min 4 s 85), engagée sur 1 500 m pour varier les plaisirs et aider sa copine Frédérique Quentin à gagner sa sélection pour les championnats du monde de Séville, l'Alsacienne (15 min 13 s 96 cette saison), connue pour son gros coeur et ses coups de gueule, devait logiquement s'imposer, comme en 1998. Mais grâce à une ultime accélération, Fatima Yvelain l'a devancée dans le temps de 15 min 44 s 72.

Deuxième en 15 min 50 s 51, Blandine Bitzner a indirectement mis en cause l'intégrité de la gagnante, s'étonnant notamment qu' « on puisse courir le dernier 400 m d'un 5 000 m en une minute sans souffler ». Elle s'est également offert un tour d'honneur en sens inverse de celui de la nouvelle championne de France et a menacé de boycotter la cérémonie du podium. Pour calmer les esprits, le président de la Fédération française d'athlétisme (FFA), Philippe Lamblin, a remis le protocole au lendemain. Du coup, Fatima Yvelain, qui a affirmé ensuite s'être trompée d'horaire, n'y était pas. En réponse à Blandine Bitzner, cette dernière propose de publier, dès qu'elle les recevra, les résultats du premier volet du suivi longitudinal auquel elle s'est soumise il y a quinze jours. « Nous nous sommes expliquées, a-t-elle dit, et Blandine affirme qu'elle ne me visait pas mais plutôt mon entraîneur [Alain Dallenbach, un ancien coureur cycliste et triathlète marié à la demi-fondeuse de haut niveau Chantal Dallenbach] . Je ne comprends pas pourquoi elle accuse sans preuve. Est-ce que je raconte que son médecin [le docteur Hervé Stoïtcheff, médecin de l'équipe cycliste Crédit agricole, la suit depuis 1997] est à Bordeaux alors qu'elle habite Strasbourg ? »

« PAS LE MONOPOLE DE LA PROPRETÉ »

Le crêpage de chignon par médias interposés continuait, dimanche 1er août, à l'arrivée du 1 500 m féminin. « Depuis que je fais des performances, certaines filles ne me parlent plus », s'est plainte Yamna Belkacem, la gagnante, auteur de trois records de France cette saison. « Ce que Blandine fait est moche, s'est insurgée Frédérique Quentin, 2e du 1 500 m, mais qui n'a pas réussi les minima pour les championnats du monde. On ne vole pas le tour d'honneur à la championne de France. Il faut qu'elle arrête de parler et qu'elle s'exprime sur la piste. Elle n'a pas le monopole de la propreté. » Des propos qui rappellent ceux tenus à l'encontre de Christophe Bassons pendant le Tour de France 1999.

Dimanche 1er août, Blandine Bitzner s'est déclarée plus fatiguée par le battage qu'elle reconnaît avoir elle-même déclenché que par sa course. « Mais j'assume ma position, a-t-elle affirmé. Ce que je dis froisse des gens, mais on ne peut pas prendre de gants avec un tel sujet. J'ai déjà eu des menaces verbales par le passé, j'espère que je tiendrai mieux le coup que Bassons, même si toute cette agitation risque de ne me rapporter qu'une contreperformance à Séville [elle s'est qualifiée sur 10 000 m] qui fera ricaner tout le monde. »

Le président, Philippe Lamblin, qui trouve le combat de Blandine Bitzner « noble », mais maladroit, car elle accuse nommément sans preuve, promettait, dimanche, la communication systématique des résultats anonymes du suivi longitudinal récemment mis en place ( Le Monde du 31 juillet) : l'esquisse d'un mouvement trop lent au goût de l'athlète alsacienne. « Je voudrais que l'IAAF [Fédération internationale d'athlétisme amateur] instaure des contrôles sanguins inopinés dès Séville », a-t-elle lancé. A Philippe Lamblin, elle a demandé une entrevue avec Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. Celle-ci devrait avoir lieu à Séville.

P. Jo.


Le Monde daté du mardi 3 août 1999
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